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Le festin du roi et de la mort

Je suis parti d'Aiguèze hier. J'arriverai avant la fin du jour en Avignon. Je n'y pouvais plus tenir. Cela fait déjà plusieurs semaines que j'hésite à aller la chercher. J’ai parfois l’impression d’avoir rêvé. De m’être fait jouer par la queue de Mélusine en personne. Ici tout le monde se pose la question de partir, s’éloigner, fuir la rumeur grondante. L’âme du village résiste, l’âme des hommes ne résistera pas longtemps à la peur. J'ai eu des nouvelles de la cité des Papes par un voyageur qui fuyait la ville. Il s'est arrêté au pied des portes pour trouver abri pour la nuit froide. On ne le laissait pas entrer, pas plus que rester. Le garde voulait le tuer. Le Mestre l'a rossé pour cela, il ne voulait point d'un mort noir au pied des murailles. En plus, il pouvait être juif, on ne pouvait pas avoir confiance en lui, même par-delà la mort. Je suis sorti par la petite porte de l'escale pour l'en trouver, il a fallu que je joue sur les bords de falaise pour ne pas me baigner dans l'Ardèche glaciale. Je suis parvenu à le rattraper, il cherchait comment franchir la rivière. Encore à cette heure, je ne suis pas certain qu’il y soit parvenu, aucune barge ne le prendra jamais. Avec les dernières pluies, s’il traverse à la nage il finira noyé par les vouivres ou saisi par la main froide du diable tout droit venu de Thueyts. Il m'a parlé de ce qu'il avait vu. Au début, il ne voulait rien dire. Il se méfiait de moi sans doute, mais surtout, je voyais bien dans ses yeux toute la terreur de ce qu’il avait vu. J’avais avec moi ma gourde de vin. Je lui en offris plusieurs gorgées pour que sa langue me livre l’horreur. Il parla longtemps dans un flot de parole continu, les images les plus horribles emplissait l’air froid. Une gorgée de vin le faisait reprendre son souffle. Il crachait à mes pieds avant que les mots ne jaillissent à nouveau de sa bouche. Son visage était laid. La noirceur de l’horreur l’assaillait de toute part. Son dos se voutait. Ses mains s’agitaient. Son visage devenait de plus en plus repoussant. La folie le gagnait, il commençait à hurler, je le sentais devenir violent, bavant, écumant un sel qui le rongeait par trop. Sa main se crispait sur le manche de son pauvre gourdin rivé à sa hanche. Ses jointures devenaient blanches, ses yeux sortant distinctement de ses orbites.

Je n’attendis pas mon reste et filai en lui laissant la gourde, le vin rouge pour noyer ses ombres dans l’Ardèche. Il n’y avait pas trace à faire pour lui. Courant vers la porte par laquelle j’étais sorti quelques heures avant, je voyais à travers ses mots. Ma tête était prise de congestion. Mon cœur me brulait. Des morts. Des morts. Des morts. A toutes les portes. A toutes les rues. La mort. Dans tous les viols, toutes les impasses, toutes les places et les marchés. Des cadavres qui tombaient du ciel, des tombereaux de corps inertes et noirs qui flottaient sur le Rhône, qui s’amoncellent sur le pont devant le Saint Nicolas. Derrière les remparts, l’odeur partout des charognes. Des pavés gorgés de malfaisance, étouffant toute vie, toute âme. La mort qui frappait aux portes la nuit et qui volait les âmes. Les sans noms, les bouchers, les tanneurs, les cordeliers, les évêques, les hommes, les femmes, les clercs, les enfants, les érudits, les vieux comme les vieilles, tous les corps de métier, tous les corps ! Sauf les juifs, disait-il ! Sauf les juifs, si injustement épargnés par la mort. Et le faubourg qui criait malgré la protection papale « A mort Juda ! Brulons les juifs ! Protégeons nos familles contre cette putride malédiction, c’est ce que Dieu veut ». A cet instant, rendu à la maison de la rue du portail haut, mon souffle reprit un peu de calme. Il était clair pour moi que je devais me rendre en Avignon. Sans dire un mot à quiconque. J’ai fait mon baluchon à la hâte avant que le père ne rentre de la Boucouse et je suis parti. Parti chercher Flamine.

J’ai croisé beaucoup de pauvres et pauvresses, leur marmaille sans pleur qui, comme ils le pouvaient gagnaient le nord, partaient chercher ici les hauteurs cévenoles, là la protection des vents secs du Plateau, l’abri sous le Mézenc, d’autres filaient vers le Puy en Velay quémandant la protection de la Vierge Marie. Mais plus sont ceux qui ont le Nord comme boussole, loin, au plus loin. Tous ces bougres m’offrent soit le regard du fou sous les remparts du village, soit le regard vidé de toute vie, la peur aussi enflammait parfois leurs rétines, la peur que le malheur ne les pourchasse jusqu’à leur mort. Me voilà maintenant face à la ville. La ville se vide. Le pont n’est plus qu’une ligne humaine striant les flots et se prolongeant loin dans la vallée, vers le Nord. Toujours. Je remonte à contre flot la marée humaine, tous me traitent de fou, aucun ne cherche à m’empêcher. Notre Dame, priez pour nous ! Flamine, ce n’est pas la mère de celui qui te protège, mais qu’elle puisse te protéger. Notre Dame, priez pour elle. Sur tout mon chemin, j’ai gardé espoir de croiser la route de Flamine. Je sais qu’elle ne prendrait pas d’autres chemin que celui allant vers notre rivière. Celle où j’ai grandi, celle où nous nous sommes aimés. J’ai fait halte dans chaque chapelle, chaque église, me penchant avec dévotion au pied du Sauveur, priant sa Mère, invoquant le Père, le tout puissant. Qu’ils puissent la sauver, elle, fille d’Abraham, perdue sur les routes dans sa troupe de troubadour, animant les places des villages sous le patronage de leur ours des Pyrénées. La troupe était restée plusieurs semaines à camper loin de l’enceinte, du côté de la berge vivaroise. C’était l’automne dernier. La forteresse ne craignait pas encore la peste, elle craignait les pillards anglois, les mercenaires de tout bord, comme les troupes des Valois. Elle n’aimait pas les juifs notre forteresse. Nos portes étaient fermées à tout étranger, déjà. A la différence que l’on n’avait pas l’idée de les tuer si ceux-ci ne nous attaquaient pas. Quand la troupe s’est installée, l’eau était bonne et vivace. Il nous suffisait de gagner Saint Martin à la nage pour assister aux tours de la troupe, mystères, fabliaux, farces, sotties, tour à dos d’ours et Flamine, Flamine, Flamine. Rousse, étincelante de rire, lumineuse comme les couleurs de l’automne. Ils sont restés le temps des vendanges. Puis elle est partie avec sa troupe s’établir en Avignon. Chaque année, comme autant de cigales ils filaient bon train à l’abri de l’auberge, chercher la protection du pape Benoit, repartant sur les routes plus libres de leurs bourses vides une fois l’hiver passé. J’y serai jusqu’au couronnement du roi du festin m’avait elle glissé dans un sourire malicieux et équivoque, rejoins-moi ce jour-là, le jour de votre épiphanie.

Je ne l’avais jamais fait avant elle. Pour aucune je n’aurais osé franchir le pas. Me voulait-elle moi ? Était-ce que je la croyais fille facile ? Je me trompais. Je le sais aujourd’hui parce que personne à Aiguèze ou à Saint Martin ne s’est vanté d’avoir troussé la belle. Tous ont dit n’avoir jamais pu parvenir à la basculer dans la paille. Un seul c’est venté, toujours le même, si bien que nous savions tous que c’était là bien mauvais mensonge. Je ne savais pas faire. Elle l’a vite deviné. Les premiers jours, malgré mon désir, je me refusais à provoquer le destin, retenu par nos Dieux, je ne devais pas. Mais Dieu ne fut d’aucun secours face à cette créature divine. Je finis par la rejoindre chaque nuit. Dans l’eau tiède et noires furent nos premières et longues caresses, je ne voyais pas son corps, je le touchais, je le caressais, ses mains parcouraient mes fesses, détroussaient mes bourses pleines avec une autorité dont je ne m’offusquais pas longtemps. Je cherchais à prendre la main, je ne pouvais la reprendre, je ne l’avais jamais eue. Elle m’en empêchait, m’échappait, disparaissait sous l’eau sans que je ne puisse la retrouver. Je finis par croire qu’elle était sirène, mélusine enchantée. Je le crois encore. Aucune fois, malgré mes nombreuses tentatives je ne pu sauver mon honneur. Nous en avons beaucoup ri. Je finis par me rendre totalement à ce qu’elle voulait. A ses lèvres coussinets de chaton attendrissant, à la pression de sa gorge onctueuse comme une volée de plume, à la finesse de ses mains habiles aventurières, à la danse ondine de son corps tout contre mon bassin. Après tout, moi, paysan, fils de paysan, descendant de serfs ancrés à la terre et fidèles à tous nos seigneurs, barons vauriens ou pieux, je devenais roi. Je n’avais pas le moyen de poser mes mains autrement que sur ses hanches, ses reins ou son dos. Partout ailleurs la faisait devenir eau parmi l’eau, s’échappant entre mes doigts. Elle me fit jouir souvent la nuit recouvert par l’ondée descendant des Cévennes, sous la falaise du Sauveur, sous la croix formée par le lichen verdâtre, sans que mon sexe ne la fende, sans que sa vulve ne m’engloutisse jamais. Les fins de journée je regardais comme tout le monde le spectacle. Cela me coûtait quelques pièces. Je n’étais pas le seul qui la dévorait du regard. Je n’étais pas le seul à me départir chaque soir d’une ou deux pièces. Mais j’étais le seul à me noyer avec elle la nuit venue. Mon travail aux champs puis à la ferme du baron s’en ressentait et le vieux mestre me le faisait montrer cuisamment.

La veille de son départ, elle ne fut pas au rendez-vous de l’eau. Je l’ai cherchée longtemps sans la trouver, je l’appelais sans trop hausser la voix pour préserver mon secret. Je fus pris de panique à l’idée de ne plus jamais la revoir. La lune luisait peu, un seul croissant très fin. Impossible de la voir. Elle n’était pas au rendez-vous. Je jetais des regards alertés dans la nuit sombre partout autour de moi. J’entendis derrière moi le bruit d’un fourré qu’on agite. Ce ne pouvait être le vent. La brise était trop douce pour apeurer à ce point le buisson. Une bête ? Un garde ? Je me retournai subitement. Je l’aperçus sur la berge opposée. Une peau laiteuse qui prenait la faible lumière de la lune arquée. Sortant d’un fourré. Ce ne pouvait être qu’elle. C’était elle. Flamine. Pour la première et dernière fois, je la devinais nue, amplement nue, son corps reflétant la rivière douce, à moins que ce ne fut l’inverse. Se tenant debout, calmement, patiemment. Je vins à sa rencontre en courant presque, manquant de tomber à l’eau, glissant sur plusieurs galets limoneux, me rattrapant toujours pour, maladroitement, finir essoufflé par me rapprocher d’elle. Tout proche, si proche. Je m’agenouillais à ses pieds, la regardant, éprouvé, des larmes perlant à ma surprise sur mes joues. Était-ce parce que j’avais cru la perdre ? Était-ce la crainte d’avoir cru être découvert ? Était-ce parce que je savais que c’était ici notre dernière nuit avant un départ définitif ? Je crois que c’était un signe du tout puissant, me disant, va, vis. Son regard était sombre, apaisant. Je l’entourai de mes bras, m’enivrant du parfum nouveau émanant de cette fente que découvrais et don je savais ne pas devoir toucher sous peine qu’elle ne disparaisse pour toujours. Mon visage était collé contre le duvet de son sexe soyeux. Ces poils me chatouillaient avec délice, formant dans mes narines des algues douces. J’en vins, sans en comprendre ni le sens, ni la raison, à disposer mon visage sur ses pieds, à lui baiser les pieds, la lavant de part ma langue, ma salive, gardienne des mots que je ne savais dire. Je me délectais de cela et ses soupirs me contentaient d’un bonheur sans nuit. Je vins enfin à caresser la peau délicate de ma longue chevelure d’homme pour essuyer ses pieds et me donner à elle sans crainte de ne pas savoir faire. Je me suis allongé. J’entendais le bruit des truites sauter hors de l’eau, le chant des effraies nichées non loin, la prière des grillons nous protégeant de leur mélodie, le bruissement harmonieux des tilleuls sous la brise tiède venant du Sud et ouvrant la cérémonie. J’étais nu. Tout comme elle. Je me forçais, résigné à m’interdire de la toucher. Je fermais les yeux, attendant que son sexe enveloppe le mien, attendant de l’aimer en chair.

Soudain je sursautai, ce n’était pas le cri froid d’une chevêche que je venais d’entendre qui produisit ce sursaut, pas même les battements d’une volée de chauve-souris, ce fut la chatouille, à nouveau, de ses petites algues de feu qui, une fois encore, venait se jouer de mes narines. Flamine s’était installée au-dessus de mon visage et rapprochée si près de moi cette fois-ci que, ses lèvres écartais par sa main, je découvrais plus précisément encore, et plus profondément surement, les parfums que j’avais à peine deviné tout à l’heure. Ivre au plus haut point, j’étais tendu comme un arc n’osant toujours pas sortir ma langue pour m’abreuver à sa source, luttant contre la fougue de la passion, contre le désir dévorant d’enfouir ma bouche de bœuf dans sa vulve aux parfums de cistre. Fidèle à notre accord tacite, je n’en fis rien et c’est elle qui vint s’assoir sur ma face rougeaude de désir, soumis à son bon plaisir. Elle s’assit sur mon nez, sur mon front, sur mes joues, me masquant la vue, m’étouffant de plus en plus. M’offrant une infirmité délicieuse. Vinrent vite les mouvements, ceux de ma langue, plus inoffensifs que la présence d’un triton dans une petite marre, ceux de ses hanches, plus forts que le ravivement des rus après les orages d’été. La vague s’amplifiait dans un mouvement de balancier qui selon l’extrémité m’étouffait tout à fait lorsque qu’elle venait frotter mon menton ou me donner une fenêtre de respiration lorsque mon front se mettait à luire de sa mouille. J’étais aux anges, je découvrais l’ultime félicité de la vie et me contentait du festin qu’elle m’offrait. Je pourrais désormais vivre ma courte vie sans autre nourriture que celle qu’elle me prodiguait cette jolie nuit de septembre. C’est fermement ce que je pensais à cet instant précis. Sous estimant la force dévastatrice et irrésistible de l’attrait de cette femme. Flamine. Flamine. Flamine. Plus encore, ses souffles, ses petits cris, ses petits mots qui me rendaient à l’enfance, sa respiration lourde et bruyante m’emportait plus surement que toutes les filles de peu de vertu que l’on n’a jamais connu de Montpellier à la Cité des Papes. Je jouissais, le cri étouffé, étourdi par l’ivresse de ses cuisses, traversé de spasmes quant à son tour Flamine me rejoins sans cesser de maintenir sa position assise, tremblant de ses cuisses, serrant mes mâchoires, appuyant sur mon visage, suffoquant, craignant que mon nez ne se casse comme une branche sèche. Je poursuivais vaille que vaille mon œuvre, mes béatitudes à la gloire de sa matrice. Enfin, elle se releva, se campant sur ses jambes, debout, regardant de haut mon visage déconfit à l’orée de l’aube qui s’annonçait. Je regardais d’en bas son sexe largement ouvert à ma vue, éclairé par les premières lumières du matin. Nous ne bougions pas. Pas plus elle que moi. Mon ventre était parsemé de ma semence perdue. Mes lèvres me brulaient. Ma langue me faisait mal. Mon visage était parfumé d’herbe de cirste, douce, légère, anisée. Je sentais que la peau de mon visage était de muqueuse humide. Je ne cessais d’être dur. Je voulais la manger encore. Qu’elle m’étouffe encore. Qu’elle ne cesse jamais de me prodiguer cette attention de séant, encore. Dussé-je en mourir d’apoplexie, cette fois.

Nos sourires disaient tout. Alors, en un flot au début timide, remplaçant tout discours, elle se mit à pisser doucement sur mon visage. Puis, encouragé par mon sourire toujours radieux, le flot se fit plus vif, plus sûr, m’inondant de chaleur, venant capter la lumière des cieux pour m’habiller d’une hermine d’or que je n’abandonnerai jamais. Je finis par me relever, fourbu par les galets plats, gêné et timide ne sachant trop que dire, trop que faire. Elle était comme moi en cet instant. Nous priment un dernier bain dans l’eau. Pesant nos âmes sur la ligne de flottaison, les offrant aux dieux païens de la rivière, filant vers le Sud rejoindre Avignon, Arles puis le grand delta et la mer des mères. Elle me glissa sa prochaine adresse. Auberge de la balance, dans la magna carreira pour l’épiphanie. Au festin du roi nous devions festoyer dans la cité des papes. Nous en avons fait promesse. J’y suis. Le festin du roi n’aura pas lieu. Celui du diable est bien là. Les pavés sont froids. Mes pas résonnent dans la grand rue. Il ne pleut pas des cadavres. Il n’y a étonnamment pas de cadavres barrant les rues, obstruant les ruelles. Les rues sont désertes. Les maisons sont mortes. Pas un souffle. Pas un bruit. Seul le cri sombre des corbeaux rythme la vie de cette ville désormais fantôme. L’enseigne de l’auberge de la balance a été remplacée par une corde. Une tête y est prisonnière. Un corps nu, de jeune femme, vide de vie, des bras, des jambes pendent dans le vide. Ce n’est pas la peste qui a tué cette femme. Pas celle qui punit les hommes de leurs péchés, la peste punit les hommes. La peste marque les hommes de son noir indélébile. La marque à jamais condamnée de leurs péchés. Le tort de cette femme fut d’être juive. Cela a été inscrit au charbon sur l’enseigne qui git au sol, sous son ombre. Sa peau à elle n’est pas noire. Elle est blanche, bleue par le froid de cette mort livide. Au crépuscule de janvier, les derniers rayons du jour font flamboyer la chevelure rousse de ma déesse Flamine. QUE LA PESTE LES EMPORTE TOUS !

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