Aux
drapés des étoffes la peau se fond en de sombres précipices comme un
néant sans écho, un lieu où la conscience de soi devient l’unique
planète d’un univers autrement vide de vie. C’est le fruit d’une
caresse, celle des draps de coton sur la douceur d’une peau singulière
et féminine, c’est la vie même qui se concentre en un point, un point
intime et autonome, un point secret et convoité. C’est cette vie des
autres qui s’échappe et s’évade de tout ce qui la retient pour lui
permettre de sonder ses propres pas abyssaux.
Expérience des frontières que l’on clôt sans pensée par le seul geste, mouvement d’un ventre frottant le revers légèrement dense et enveloppant d’un matelas de latex transformé en fond d’océan.
Expérience des frontières que l’on clôt sans pensée par le seul geste, mouvement d’un ventre frottant le revers légèrement dense et enveloppant d’un matelas de latex transformé en fond d’océan.
Il n’y a la ni lumière, ni bruit.
La silencieuse prend vie.
La silencieuse prend vie.
Elle croît de
ses bribes autonomes, grains de sables étanchant la soif tumultueuse
pour noyer l’ennui, pour étouffer le superflu afin de mieux irriguer
l’essentiel par des débordements qu’un œil distrait jugerait muets.
C’est le souffle
naturel qui s’échappe de ses lèvres, ces lèvres que tout homme
souhaiterait baiser pour en recueillir l’infime et l’indicible, le
toucher du bout des lèvres, le caresser de la langue et le ressentir se
propager par vagues lentes jusqu’à atteindre le cœur et devenir
contagion. Un souffle ténu, petite mort et grande vie sur la plongée
d’une main creusant son sillage dans l’onde bleutée d’éternel au hasard
des plis du tissu, trouvant la chaleur d’un sable mouvant et chargé
tant de mort que de vie.
Seule, la
silencieuse suit son cours, écartant les draps recouvrant son corps par
des déhanchés lascifs et successifs, frottant le matelas de son ventre
et de ses jambes par mouvements éparses et réguliers, un bras replié,
l’autre serpentant au fond des mers chaudes de son pacifique irisé
d’iles désertes et sauvages.
Ses cheveux
s’épanchent et ses lèvres se mettent à mordre le vide se fondant dans
les profondeurs du lit nuage. La gorge se tend, se crispe, des coraux
rouges et tranchants prennent relief et disparaissent comme le souffle
qui les a porté à naître, jusqu’à perturber légèrement le silence de la
scène par une plainte faible, longue et langoureuse, un chant universel
et éphémère qui fait naître la vie sur les lèvres vaporeuses de la
silencieuse.