Elle n'a pas pris de gant. Je ne sais même plus si j'ai ouvert la porte. Ni quelle porte. Es tu rentrée par la fenêtre ? As tu brisé les carreaux pour débarquer ici comme une furie ? Est ce que j'avais sciemment laissé les fenêtres ouvertes aux quatre vents ? T'ai je vu récemment en t'invitant à me rejoindre après une nuit à foutre tous les fantômes de mon île surpeuplée ? Reste que tu es là ! En l'espace d'un instant tu te saisis de tout. Et tu brises ! Tout ! Tu arraches, tu déchires, rien ne résiste à tes assauts. Et moi je ne sais plus ce que je fais. Je ne sais plus qui de toi ou de moi porte mon prénom angélique. Ce démon ! Ton souffle me brûle. Et je réponds à ton chant par l'exigence de la déflagration. Je veux ! Je prends. Je laboure la terre. Et je plonge. Je plonge en elle. Dans tes entrailles. Dans tes veines. Dans mes tripes. À arracher les tiennes d'un geste brut et irréfléchi. Une violence sublime et terrifiante qui me déchire, qui m'irradie. Elle se saisit de moi, maître pantin. Manger. Dévorer. Croquer. Déchirer. Mâcher. Lacérer. Te bouffer ! Te bouffer. Voilà ce que je veux. Je veux te bouffer en hurlant comme un démon. Je veux te fendre de part en part pour que mon souffle puisse brûler chaque viscère s'écoulant de ton corps. Je vois ma main en toi et je veux t'écarteler les entrailles, fourrer mon bras tout entier en toi. Jusqu'à faire de ta chair, de tes os, de tes nerfs un champ de labour profond et sombre, saignant et palpitant. Saisir les glandes surproductrices de ton cerveau, et serrer. Broyer. Broyer a pleine main, lui faire rendre son jus. Tout son jus. Tout. Le boire à grande gorgée, assoiffé, à m'en foutre partout. je lutte contre cette trainée de poudre. Parce que j'ai peur. Je lutte contre les pulsations nauséabondes de mon âme. La rage. Je suis rage. Rage violente. Je ne suis plus que battement animal. Tressaillement de la terre. Cela me dévore. Cela explose en moi et me sidère. Le désir de te faire mal me terrifie et m'emporte loin, haut, haut dans les profondeurs de la jungle humide et étouffante. Immense maelstrom qui se joue là en moi. Pris de vertige. La douleur est telle que j'ai envie de pleurer à grand sanglot, sidéré par mon propre état d'être qui veut te réduire en un liquide liqueur que je laisserai coulé à grande eaux dans la panse insatiable. Alors j'immobilise mes mains. Je les pose le long de mon corps. Je m'éloigne un peu de ton corps qui irradie de toute sa sexualité généreuse et totalement offerte. J'ai mal et j'ai peur. Je n'ai qu'un désir, tout entier offert à ma gloutonnerie. En un terrible effort, je pose mon visage contre tes hanches. Je balance ma rage hors de moi. Refermant vite les portes de cet enfer à double tour. Ton ventre est doux. Ta peau est tendre. J'ai envie de pleurer. J'écoute les battements de ton ventre.
Hier, je suis rentré du chemin retrouver les miens. Douze jours loin d'eux. Douze jours sur mon chemin. Cette année, j’ai passé sur le chemin dix jours seul, et j'étais merveilleusement bien. Cette année, j'y ai passé aussi pour la première fois deux belles journées et deux nuits fauves toutes particulières, et c'était naturellement et vicieusement merveilleusement bien, j'étais bien avec elle. J'étais bien avec toi. C’était bien d’Être avec toi. J’ai débuté ce chemin, il y a treize ans après une crise profonde au sein de mon couple. Pendant ces treize ans, je crois pouvoir dire être devenu l’homme que je voulais être. Nous avions à cette époque, douze années de vie commune derrière nous et une petite fille de deux ans. J'avais tellement vécu pour toi et pour les autres que je ne savais pas qui j'étais. Depuis, si ce n’est l'année de naissance de mon fils il y a dix ans, deux années calédoniennes, et deux années sous cloche sanitaire, j’ai arpenté ...
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