Ils ont taché de reprendre leur souffle, je me suis
mis en retrait légèrement, à nouveau adossé à ma chaise. Je n'ai pas
profité pleinement du plaisir offert, je crois que mes sensations
étaient davantage portées vers le bien être de cette femme que vers mon
propre plaisir. Pour ne pas les gêner, j'ai repris une autre lecture,
leur permettant de reprendre pied. Profitant de ma lecture, son amant
l’a ensuite conduite à la tête du lit. Enchaînant ses poignées aux
boiseries. Je me suis levé, pour me mettre au pied du lit. Ses jambes
étaient écartées, je distinguais sa toison dans la pénombre. Elle avait
des jambes magnifiques, un corps grand, ferme, des seins opulents. Je
découvrais son corps. J'ai regardé ses pieds, la tension de ses pieds,
une courbe parfaite, une très belle vision. Puis elle a chevauché son
homme, je ne voyais d'elle que son dos, les bougies projetaient contre
le mur blanc leur silhouette parfaite, un visage d'homme en ombre
chinoise, la bouche ouverte et un corps de femme magistralement empalé.
Elle se frottait contre lui, j'entendais le cliquetis des chaînes qui
les liait l’un à l’autre. Je me suis déplacé, pour me mettre contre le
mur, me fondant dans leur ombre, mêlant ma réalité à l’imaginaire
qu’ils m’offraient, mon corps à leurs silhouettes imbriquées. C’est
dans cette ombre que je les ai épiés, toujours légèrement en retrait
pour ne pas perturber les territoires célestes qui se déroulaient sous
mes yeux.
Nouveau changement, il l’a faite se lever, se
dirigeant à mon opposé. Main dans la main, ils se sont rapprochés d’une
grande armoire. Il l’a placé dos contre l’armoire, a saisi ses deux
mains féminines pour attacher ses bras très haut au sommet du meuble,
puis lui a bandé les yeux. Les ombres se dissipaient et le dessin se
précisait. Je distinguais cette fois son corps parfaitement, une femme
d'une quarantaine d’année, peut être plus. Une femme au corps toujours
aussi puissamment doté d'érotisme. Qu'elle était belle ! J’aurais pu la
contempler longuement encore. Je n'ai rien dit, je n'ai pas bougé. Elle
portait une nuisette argentée, il essayait de remonter cette nuisette
en vain pour qu’elle ne cache rien de cette belle poitrine. Elle
chutait sans cesse, dévoilant, puis recouvrant le satin de la peau par
le tissu satiné. Il s'est assis sur l'angle du lit. Le visage à hauteur
de son sexe, je devinais des odeurs de sirènes, tentatrices et
hypnotiques, son corps ondulait, elle dansait en silence, faisant
rouler ses hanches, approchant sa toison en une vrille perpétuelle
inaccessible à son amant. Dévot, lui portait ses mains sur sa queue,
comme pour exciter davantage ses sens à voir et sentir sans troubler le
charme de cette sirène. S’interdisant de toucher.
Il m’a invité à me rapprocher, je ne sais plus s’il
s’agissait de mots, d’un geste ou peut être ais-je simplement voulu
qu’il m’invite. Je me sentais cette fois pleinement avec eux, enfin
libre dans leur intimité de couple. Je n'attendais que cette
invitation, j'avais envie de soulever le tissu, je voulais voir ses
seins, je voulais y déposer mains et lèvres, caresses douces et
humides. Une poitrine justement proportionnée, relevée par la tension
des bras, parfaitement dessinée. Alors, tout prêt, j'ai pris cette
initiative, elle n'a rien dit, consentante dans son silence. Le chemin
m’était ouvert. Elle continuait à onduler des hanches et lui a se
branler bruyamment, excité par mon intuition à maintenir les seins de
son amante enfin visibles de lui comme de moi. Il s'est alors
agenouillé devant les lianes de ses jambes, et l'a à nouveau entrepris
de sa langue. Soutenant le tissu d’une main, l’autre s’est faite
caressante. D'abord léger, puis plus présent, mes doigts ont plissé ses
tétons, je les ai étiré, comme je les aime. Elle appréciait.
Je me souvenais encore de cette limite posée
quelques jours auparavant, je pouvais voir sans autre chose. Elle ne
souhaitait que les mains et les baisers de son amant et je ne serai
présent que par ma voix. Serais-je donc devenu son amant, un homme
autorisé à me fondre et partager ses flots intimes ? J’appréciais le
chemin parcouru, orchestré par ma discrétion, me fondant dans leur
univers, trouvant ma place naturellement, cette fois nous étions trois.
Son plaisir une fois de plus augmentait, de plus en
plus. Mes doigts se sont rapprochés de la commissure de ces lèvres,
j'ai parcouru la tendresse de ses muqueuses, comme j'aime le faire pour
chaque femme, suivant le pourtour des lèvres comme s’il ne me restait
plus que mes mains pour voir. Sa langue est venue timide, toucher mes
doigts, me permettre d'humecter ses lèvres pour les rendre plus lisses
au toucher. J'ai rapproché mes lèvres des siennes, je voulais sentir
son souffle saccadé par les coups de langue de son amant, je voulais
qu'elle sente ma présence invisible. Dans un souffle elle a prononcé
quelques mots. « Je vous sens, je sens votre parfum ». Ces premiers
mots. J’étais donc devenu enveloppe invisible, impalpable, une bulle
hors du temps, un homme invisible et pourtant présent. Ma main s'est
posée naturellement au creux de ses reins pour l'inviter à s'ouvrir
encore plus à la caresse de celui qui avait permis cette rencontre. Sa
peau était chaude, humide, transpirante. Nos souffles se mêlaient,
j’aurais aimé que la température soit froide pour voir nos souffles
fusionner en une humeur diaphane. Je n’ai pas eu envie de l’embrasser,
je voulais que l’invisible soit palpable, seuls nos souffles se
fondaient l’un dans l’autre alors que plus bas d’autres souffles
l’emportaient. J'ai a nouveau entendu sa voix deuxième phrase
prononcée. Des mots répétés en une trainée continue, « je vais jouir,
je vais jouir, je vais jouir ». Des mots conclus en un dernier souffle,
un dernier petit cri. Son corps s'est relâché, comme sans force, comme
si toute la tension de son corps s’était évaporée avec son dernier
souffle. Est-cela la petite mort ? Expirer toute la vivacité de notre
corps en un dernier souffle ? Nous l’avons tout deux détachée, soutenue
jusqu'au lit où elle s'est assise, amante repue et exténuée, malade de
s’être trop offerte. Un peu d'eau tout d'abord. J'avais apporté pour
eux des viennoiseries et des briques de jus d'orange frais, on ne
répond jamais à une invitation les mains vides. Je les leur ai
offertes. Eux, les amants qui ne s’étaient pas comptés jusqu’alors.
Leurs regards hagards, leurs peaux transpirantes. Je me suis à nouveau
assis sur la chaise face à eux, échangeant très peu de mots, comme si
l’équilibre après cette sensible jouissance était encore fragile.
L’intimité pouvait encore s’évaporait bien que nous ne le désirions pas
pour l’heure.
Je souhaitais encore parcourir leur territoire de
mon regard, ils souhaitaient encore s’abreuver de ma présence. J'avais
envie de profiter de ces instants jusqu'au bout, jusqu’aux dernières
minutes qui nous seraient offertes. Il a alors allongé notre muse sur
le dos. Cette fois, actif et non plus voyeur, je me suis levé, j'ai
pris l'une de ces chevilles pour la positionner de façon à ce qu'elle
écarte bien les jambes, elle ne devait plus rien me cacher. Je la
voulais offerte, il la voulait offerte, elle se voulait offerte. Nous
la voulions indécente. Il lui a confié un objet oblong, métallique,
doré. Elle a commencé à se pénétrer et à faire de rapides vas et viens
avec. J’entendais les flux et reflux de ses pénétrations, femme sirène,
naïade libre de se donner. Je me suis agenouillé pour regarder ce
spectacle, j’aurais pu encore un fois longuement la contempler,
j’aurais voulu longuement la contempler, mais comment résister ?
Comment ne pas en vouloir plus ? Comment ne pas vouloir toucher,
goûter, pénétrer ?
J'ai caressé ses jambes, sa peau dorée par le
soleil, une peau parfaitement lisse en toute partie de son corps. Une
peau apprêtée pour le plaisir de son amant et le regard d'un inconnu.
Une peau parfumée d'un parfum entêtant, enivrant. Mes mains se sont
approchées de son pubis sans fouler des territoires que je n'osais
m'octroyer. Elle, se masturbant toujours. Lui, prenant le soin d'une
lecture, un poème sur un pont lyonnais. J'ai rapproché mon visage, je
voulais sentir sa peau, je voulais sentir l'odeur de son sexe, je me
suis donc placé au dessus de son sexe et j'ai senti cet effluve
discret, un effluve terriblement excitant. Je me suis fait éole,
élément d’air pour souffler le feu. Mes lèvres exhalaient une chaleur
douce sur ses lèvres ouvertes, insufflant toujours plus de ma présence
invisible. Ma main s'est posée sur celle qui tenait l’objet de plaisir,
prenant le relais de cette course si douce, elle m'a laissé conduire et
c'est moi qui l'ai pénétrée par des mouvements longs ou saccadés, droit
ou en biais, circulaires ou rectiligne. Donnant le rythme à son
souffle, imprimant son corps.
Cette fois, mon corps dictait sa présence. J’étais
dur, fier, homme. Lui m'a invité à la gouter, à moins qu’une fois de
plus je n’aie imaginé cette invitation. Suite logique, sans hésitation,
sans question, je l'ai goutée, une main faisant pénétrer le gode,
l'autre sous sa cuisse pour maintenir ma prise. Avait-il déjà joui en
elle ? Même cette question n’a pas effleuré mes pensées. Peu
m’importait, tout était si subtilement naturel. Elle recevait ma
langue, elle offrait ses lèvres au sexe de son amant. Il poussait des
râles d'hommes, comblé par cette langue que j’avais connue timide sur
la peau de mes doigts. Son corps se mettait à nouveau à onduler, la
sirène émergeant à nouveau du néant du dernier souffle. Second souffle.
Je m'appliquais à la faire renaître, son amant faisant de même.
Appuyant ma langue en de fortes pressions, je m’emparais soudainement
de son clitoris, alors que lentement en elle le plaisir n’avait de
cesse de grandir. Ses mots sont revenus, mais cette fois ce n'était pas
pour la litanie du futur proche. Non, elle nous disait "je jouis, je
jouis, je jouis, je jouis". Et son corps s'est contracté quelques
secondes, envahi à nouveau par une force qui nous aimante tous. J'ai
relâché ma prise doucement, sa main est venue se poser dans mes
cheveux, une caresse douce, sensible, un remerciement en silence. Elle
venait de jouir sous l’énergie de deux hommes, pour la seule et unique
fois de sa vie. C’est en ces moments là que j’aimerais être à la fois
dans et au dehors, voir et ressentir, voir ce que je donne, ressentir
ce que je donne. J’aurais aimé connaître ses pensées, ressentir ce
qu’elle avait vécu.
La pression n'était pas retombée, tout nous poussait
au troisième souffle, doucement, et pourtant plus fortement encore. Nos
corps se sont déplacés. Les prémices du premier souffle m’avaient
offert, debout, une introduction discrète, le second souffle, à genoux,
un baiser plus présent, que m’offrirait ce troisième souffle ? Allongé
le long de son corps, l’intimité m’invitant le long de cette femme dont
je ne connais pas même le prénim, son amant assis sur le lit, reprenait
sa lecture. Elle et moi. Nos regards se sont longuement croisés.
A-t-elle su déchiffrer ce que signifiait mon regard ? Qu’a-t-elle su
lire dans mes yeux. Ses yeux sombres me semblaient pour ma part
quasi-indéchiffrables. Il y avait dans les traits de son visage une
douceur qui m’était offerte en silence, je ne saurais en dire plus. Mes
mains parcouraient son corps, nos yeux étaient rivés et pourtant je ne
sais pas ce que nous nous sommes dits en silence. Mes mains ont
cheminé, doucement, très doucement, sur les jambes d'abord, prenant les
dimensions de leur longueur fuselée et féminine, parcourant la cassure
du pied cette inclinaison que je trouve de plus en plus magnifique. Les
caresses ont été douces, presque sans toucher sa peau, j'ai caressé son
visage, parcouru le collier de chaîne serré autour de son cou. Sa
nuisette recouvrait à nouveau ses seins. Mes mains son restées proches
de ses jambes, aimantée par cette partie du corps que ma langue avait
patiemment entreprise.
J'ai saisi sa main, je l'ai déposée contre mon sexe
pour qu'elle sente la chaleur qui s'en dégageait au travers du tissu
fin de mon pantalon de costume. Elle a laissé sa main là, une nouvelle
fois consentante à plus que je n’aurais espérée. Ses doigts ont glissés
sur ma cuisse, caressant ma cuisse de façon distraite. J'ai dévoilé ses
seins, la nuisette était prise sous son corps, j'ai tiré un peu plus
fort pour qu'elle puisse être libérée, enfin ses seins m'apparaissaient
à nouveau. Il a fait de même avec l'autre sein. Voilà que venait le
temps des gémeaux, Nous avons tous deux pris un sein entre nos lèvres,
je crois que c'est alors que mes mains ont glissé à l'orée de ses
lèvres, pour voir ce sourire du bas, pour le faire sourire encore plus.
Elle s’est alors saisie du sexe de son compagnon, l’a caressé. Je les
ai regardés, ma main a-t-elle cesser de parcourir son intimité ? Sans
doute, puisque, le visage allongé auprès du corps de ma céleste amante,
envahi de ses parfums…
J'ai eu envie…
J'ai eu envie de toucher ce sexe d’homme. J'ai
hésité un peu, si peu en fait, comme dans un rêves, pourquoi
s’interdire ce qui peut être vécu, ma main a suivi le bras cette femme,
elle m'a laissé la place, heureusement surprise de cette initiative
inattendue, tant par moi que par eux. Sa main s'est portée vers ses
bourses, et mes doigts se sont posées sur ce sexe d'homme pour la
première fois, pour quelques timides vas et viens. Avant de replonger
vers elle, préférant la chaleur de son antre à la dureté de l’homme. Je
l'ai pénétrée de mes doigts. Je l'ai baisée ainsi, de plusieurs doigts,
décidé, envahi par le plaisir d'être tous trois ici. Sa main cette fois
n’était plus distraite, elle me branlait au travers du tissu, elle
voulait explorer plus encore. Mon sexe était ferme, dressé, envahi
d’émotions naissantes tandis qu’à l’opposé de sa main, elle le suçait
avidement, j'entendais ses râles. Plus je la pénétrais puissamment,
plus elle le masturbait avec vigueur. Voilà qu’un tourbillon s’emparait
de nous, elle, lui et moi, des vents convergents, s’engouffrant en un
étroit passage pour nous emmener, loin, très loin, toujours plus proche.
Sa main s'est posée dans mon dos, elle s'est plaquée
contre moi, me rapprochant encore plus. La sirène se faisait pressante,
demander l’abandon, chanter le plaisir. A cet instant, j'ai eu envie de
lui faire l'amour, à cet instant j'ai eu envie de succomber à ses
chants, à cet instant je désirais me fondre en elle et m’y perdre, à
cet instant j'aurais pu sucer son amant, j'aurais pu m'abandonner à
tout. Tout devenait de plus en plus pressé, tout devenait tout. Tout
était possible. Tout était espérait. Tous les afflux convergeaient.
J'ai du ôter la main de ma sirène pour ne pas jouir dans l’instant.
Mais je n’ai pas rompu le charme, mes mouvements en elle persistaient
de plus en plus bruts, le troisième et dernier souffle prenait corps
cette fois sans barrage. Elle a accroché l'arrière de ma chemise,
esquissant l’envie de tout arracher pour libérer le plaisir accumulé.
Je crois qu’elle et lui ont joui dans un même élan céleste, lui
répandant sa semence sur le buste de son amante, elle explosant des
chaînes intérieures plus secrètes.
Le temps s'était égrenait à une vitesse folle,
j'aurais voulu rester avec eux, profiter de cette volupté naissante.
Mais l'heure était là, je les ai remerciés tous deux, le regard
souriant, alors la porte s'est refermée. Longtemps dans la journée ma
main droite a conservé les effluves du plaisir de ce troisième souffle,
animal, je la léchais de temps à autre pour retrouver un peu de son
goût. Longtemps dans la journée ma main gauche a conservé secrètement
l'odeur d'une peau féminine inconnue jusqu’alors, et longtemps je me
suis enivré de ce parfum, avant de devoir effacer toutes traces sur mes
lèvres comme sur mes mains... Elle me confira plus tard, que ce trois
souffles, comme nos trois êtres, avait donnait à sa relation charnelle
et amoureuse une nouvelle lumière, plus forte, un nouveau chemin
ouvert, curieux et amoureux, un bouillonnement constant à entreprendre
ces vastes territoires célestes.
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