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Lieu tabou

 Le diaporama de mon long voyage en Nouvelle Calédonie défile. Cela faisait longtemps que je n'avais pas vu Hervé et Sophie. Près de 4 ans. C'était avant mon départ. Je n'aurais jamais pu imaginer qu'ils puissent finir ensemble. Ce sont deux amis avec lesquels j'ai toujours eu la sensation que nous étions frères et sœurs. Eux n'étaient pas proches et ne se fréquentaient pas spontanément. Mais entre nous, c'était fluide, naturel, simple et évident. En quatre années beaucoup de choses changent. A commencer par soi. Hervé et Sophie se sont séparés de leurs conjoints. Ce fut difficile pour tous deux. Les enfants. Les déménagements. Et puis visiblement, un jour, l'étincelle entre eux. J'ai suivi cela de loin, par écrans interposés. Avec 17000 km de distance et 10h de décalage. J'aurais aimé qu'ils viennent jusque là bas avant que je ne rentre définitivement. Je leur aurais fait visiter les forêts de mousse, le maquis minier, la traversée des creeks, la forêt sèche, les nuits en tribu, et le lagon, le lagon à en prendre plein les yeux. A défaut, je rattrape comme je peux ce soir ce déficit d'image. Je parle beaucoup. Je commente. J'essaye de leur faire comprendre l'invisible. Je suis heureux qu'ils soient là ce soir. Je n'ai pas vu beaucoup de monde depuis que je suis rentré. J'ai laissé là-bas beaucoup de mes amis et ici la ville et les quelques bouts de vie que je viens de vivre me semblent dépeuplés. Hervé et Sophie repeuplent un peu mon moral. Ils sont beaux tous les deux. Leur désir est palpable. Entre deux gorgées de vin, ils s'échangent des regards qui en disent long sur ce qui suivra leur départ. Moi, j'ai un peu trop bu et ma vessie ne saurait contenir plus de liquide. Assis sur les toilettes, je cuve un peu, la tête qui tourne et les mains cotonneuses, mais surtout je sens la drogue et l'alcool faire leur office. Je suis heureux. J'ai laissé le diapo défiler. Je les entends rire. Sophie a un rire particulier, un peu comme des micro-orgasmes. Je m'en suis souvent moqué, taquin. Cela faisait très longtemps que je n'avais pas entendu son rire. Je me rends compte qu'il me manquait cruellement. Je dois avoir un sourire un peu benêt. En fait, si Sophie est dans mon cœur comme une sœur, elle est aussi l'amie que j'aurais aimé aimer et baiser. Je pense que cela aurait été simple, sans enjeu, juste joyeux et déluré. Cette pensée-là me rend heureux. Et je continue d'entendre le rire troublant de Sophie. Il est temps de les rejoindre pour me joindre à eux et comprendre enfin ce pourquoi elle rit tant.


Je sors des toilettes, en partie débraillé, la ceinture pas encore bouclée. J'ai un peu de mal à comprendre la scène. Sur le grand écran, je me vois, moi, prendre en levrette une femme tandis qu'elle coule de pisse et de jouissance. Je me vois entrer en elle, puis sortir. Réitérer ce mouvement lentement. Fixer ce membre qui entre et qui sort. Je vois ma main qui s'abat, qui fesse, qui rougit, qui griffe et qui arrache des cris. L'image tourne se fige sur l'entrecuisse de la femme, prise par mon petit sexe, coulant à grandes eaux. Le son est mauvais, mais maintenant je comprends que mon diaporama à glissé sur la vidéo d'une de mes nuits d'ébats calédonienne. Une soirée au Fronton, une after arrosée à la Bodéga, beaucoup de musique, 200 personnes alcoolisées fraternisant gaiement, dansant la dernière avant la fermeture et chantant les larmes aux yeux que l'amour est un bouquet de violette parce que c'est ce qu'il est, un bouquet de violette, et une jeune femme dont je ne saurai jamais le prénom, qui se retrouve avec moi sur ma terrasse face à la baie de l'Orphelinat à baiser tant et plus comme deux animaux en rut sous 'e clair de lune tropical.


Le rire de Sophie n'en était pas vraiment un. Hervé est entre ses cuisses il lui lèche le cul et le con, je devrais dire qu'il les lui bouffe copieusement même. Et Sophie qui lui demande de la lécher comme la petite truie vicieuse qu'elle est. Oh mon dieu comme je suis pris de diablesse. Mon sexe a compris la scène avant moi le salaud ! Il bande fort. Mon sang n'a fait qu'un tour. J'ai très envie. J'ai très envie depuis longtemps en fait. Je me sens tout d'un coup Gargantua, ogre, démon et diable, oiseau aussi, colibri, comme son tatouage à elle. Eux ne semblent pas le moins du monde gênés par ma présence. Devant eux l'écran continue à montrer cette scène du bout du monde qui revit, là sous mes yeux, sous nos yeux. Et moi j'ai faim ! J'ai faim !


Ma bite à la main, le jean sur les chevilles, la tête prise de vertige, et le désir inervant tout mon corps, j'approche mon sexe en glissant ma main dans ses cheveux. La garce me prend, m'avale et me fait disparaître en elle. Rideau ! Je ne suis plus là. Je suis dans sa bouche tout en entier, lové dans la moiteur baveuse de sa bouche. Ma tête est contre sa langue et ma queue se frotte à sa glotte. Dehors j'entends les râles d'Hervé en partie étouffés. Cela secoue à l'intérieur. La barrière des dents s'ouvre de temps à autre pour aspirer un peu d'air et m'en donner, me donner de la lumière en ce monde de chair. Je ne veux pas glisser en elle trop loin, trop bas. Mais sa langue est un matelas de vice contre lequel je me roule, frottant ma queue sans fin, agrippant mes mains contre son palais et la baisant encore et encore. Je lui baise la bouche, je me noie dans sa bouche, je bois sa bave et de ma langue lèche cette immense tentacule pulpeuse. J'enfonce mes genoux dans l'épaisseur savoureuse de ses muqueuses. Je me revois jeune adolescent baisant la mollesse de mon matelas à grand coup de reins. Fermant les yeux et voyant toutes ces jeunes femmes que je n'osais souiller de mes désirs, prenant des mères de famille, prenant leur fille, me faisant violer par toutes ces femmes, je revois cela et moi, mon émoi est intact, le plaisir m'inonde, me fauchant comme une vague à double lame, déversant mon sperme dans cette gorge grotte, mon sperme se répand, je suis tétanisé, il m'ensevelit, il nappe sa langue de crème, il me recouvre à mon tour et m'enveloppe comme une étrange chrysalide poisseuse et odorante, je manque de m'étouffer, je vais finir ou par me noyer, ou par mourir dévoré et mis à sac par son estomac. Qu'importe, j'aurais joui de ces derniers instants. Sophie finit par jouir en un déluge sonore. Ce n'est pas un rire. Aucun doute.


Sonné, je ne sais plus trop ce qu'il m'arrive. Je reprend souffle, complètement électrisé, le cœur battant, le souffle court, le visage gluant de sperme. Hervé est debout face à moi, le regard hagard, le sexe rouge et tressautant. Sophie me lèche le visage. La vidéo a laissé place à des photos du lagon. La faille Shark. Les collines ondoyantes de Deva. La mangrove et le cœur de Voh. La poule de Hienghène et les falaises noires de Lindéralite. Les grottes étranges de Koumac et, là, un manou marquant l'entrée d'un lieu tabou.


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