Texte imparfait et non sélectionné écrit dans le cadre des quelques heures qui étaient données aux participants du prix de la nouvelle érotique 2022.
Le thème était : avis de pas sage, et le texte devait se terminer par le mot "bâton"
De toute évidence, j'ai eu beaucoup de mal à rentrer dans ce thème, j'ai du user de subterfuges qui était tout à fait visibles
Rendez-vous l'année prochaine (ou pas)
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As tu déjà compté les pas qui t’en séparent ? Tous ces pas que tu alignes croyant t’en éloigner pour t’en rapprocher. Tous ces pas que tu traces et qui sans cesse s’effacent. Toutes ces distances que tu parcours à la recherche de ce qui ne se trouve pas. Ce qui t’amène sans cesse à tanguer, te laisser emporter par la houle, te glisser on ne sait dans quelles profondeurs de la vague, loin derrière le ressac. Crois-tu qu’un jour, la peau suffisamment à vif, abrasée tant et plus par la caresse de leurs coraux de feu, tu pourras enfin cesser de courir ? T’arrêtant sur le bord du chemin, là haut, reprenant ton souffle après avoir cheminé, transpirant, sous les étoiles, seulement guidé par la fine lune et l’écho de la ville plus bas, après une nouvelle nuit sans fin, tu regarderas l’aurore s’esquisser, puis le soleil réchauffer lentement ton visage, ciselant tes mains, inondant la roche sous tes pieds avant de se répandre, irrésistible, sur la plaine nuageuse quelques mille mètres plus bas, celle qui enfin s’écoulera à tes pieds, celle-la même qui coulera enfin dans tes veines. La sagesse.
La sagesse que tu auras accumulée à force de faux pas, de trésors en trésors, sauvagement enfouis, préservés du regard des autres, pleins d’étrangetés et d’oublis, ces scintillements recueillis en foulant de la pulpe de tes doigts toutes ces chairs éventrées, bruissantes et fiévreuses. Là, quand tu enfouissais tes doigts dans la tendresse, entre les replis, plus loin encore dans les soupirs, plus loin si possible jusqu’à toucher le tréfonds. Oui, là. Là, quand tu te perdais ailleurs dans des bouches fraîches, sous les regards torves, sans autres avis de pas sage que ceux déposés par tes baisers. Tes mots baisés, tes mots baisers, tes morsures brasiers se répandant sur la langue et glissant au fin fond des gosiers assoiffés, quand plus rien ne peut épancher la soif que le vice et la drôle de beauté.
Ces choses-là que l’on ne dit pas, ces tremblements de l’âme qui se répandent en frissons sur la peau. Elle t’a souri et tu étais captivé par la simplicité du bonheur qu’elle montrait à voir. Elle t’a souri, alors tu t’es jeté sur ses lèvres et, de tes bras, répondant au même mouvement que le sien, tu l’as étreinte au plus fort contre toi pour lui montrer la force du désir et de l’amour qui t’inondait soudain par son simple sourire à elle. Plus tard, déjà ta main était dans son ventre et tu l’ébranlais d’une autre force, plus violente encore, plus démente sans doute, puisque l’un et l’autre vous vouliez cela. Vous perdre dans la tempête, loin dans le désir haut, quelque part derrière les ombres.
Certaines nuits, tu cessais de faire de ta main un sexe, tu la retirais lentement, pleine d’amas et de filets blancs et tu venais la poser sur sa gorge, t’allongeant à son côté, posant tes lèvres sur la bordure de son lobe, absorbé par la chaleur de son flanc. Et tu commençais à chuchoter, inventant des poèmes pour semer en elle des lierres envahissants, venant étreindre sa respiration, cisailler ses dernières retenues pour qu’elle tangue. Oui. Qu’elle tangue plus loin que la houle, ses doigts comme des vagues de papier de verre, irritant le petit prépuce niché entre ses lèvres, sur la mer de tes mots salés et sales. « Branle-toi, branle-toi petite branleuse », tu lui disais tandis que tes doigts se refermaient sur sa gorge. « Oui, voilà, c’est bien. Laisse-toi emporter. Laisse-venir ». Tu lui parlais et tu la regardais. Tu serrais sa gorge et tu la regardais. Tu voyais son visage partir loin ailleurs, son visage se transformer en statue céleste, emportée par le flot de tes mots crus, salaces, vicieux, dépravés et aimants.
Hier, tu t’es une fois de plus laissé emporter par les spasmes saccadés, t’amenant irrémédiablement entre le rire dément et les sanglots houleux, toujours aussi surpris par la pièce lancée et qui toujours tombe sur la tranche entre les pleurs et la joie. C’est ce qu’il se passe quand tu lui offres ton cul, qu’elle te cheville le corps et t’engloutit tout entier. Lentement elle te consume, pantin à sa guise, poupée mue par les mouvements qu’elle fait naître de l’orée de ton cul à la naissance de ta nuque, se propageant dans tout ton être. Tu pourrais te laisser dévorer, fendu de toute part d’une galerie souterraine, creusé, excavé, anéanti, envahi et comblé par quelque chose qui n’a pas de nom, mais qui t’arrache des râles que tu n’as jamais entendu. Ne plus être et vibrer, plus abandonné encore que la Bienheureuse Ludovica Albertoni
On devrait l’exposer au milieu d’une clairière pour laisser les saisons la couvrir d’attention. Tu viendrais la voir recouverte de neige sous la lune, tu glisserais ta main entre ses cuisses, ferais fondre le triangle de neige pour l’arracher au sommeil, la rendre plus lascive encore et voir son souffle se matérialiser dans la froideur du jour qui ne serait que nuage de coton gris. Tu ferais cela comme tu l’as fait sur elle, cette fois où tu l’as faite se dénuder dans la neige, les mains disposées contre le tronc d’un boulot, recueillant entre tes mains une branche encore verte échappée à l’hiver, la brisant simplement avant de l’abattre sur le cul mis à nu, réchauffé, l’abattre, brûlure, de l’albâtre au rouge vif. Te nourrissant tel un ogre des bruits de bouche et de gorge, de ses doigts crispés entre les feuilles de l’écorce de noir, de gris et de blanc. Entends-tu ? Entends-tu comme le désir s’éveille ? Comme il explose ? Entends-tu cette chose qui n’a rien de sage, cette chose si étrangement troublante et sale qui te fait écarter tes cuisses, accroître le rythme des battements de ton cœur, martelant le ventre, réclamant sa pitance, ne te laissant de répit qu’en de rares instants ?
Une nuit, elle a ouvert la fenêtre. Je la regardais. Il avait beaucoup neigé dehors. Une nuit noire s’abattant sur la campagne. Elle a ouvert la fenêtre pour fumer ce qu’elle s’était roulé. Quelques monceaux de neige sont tombés sur le parquet. Elle portait un pull de laine blanc, laine épaisse et rêche. J’aimais ce pull, car lorsque je l’assaillais de tout mon poids je sentais pleinement la matière résister entre nos peaux brûlantes et laisser en nous sa petite morsure, tandis que je lui prenais le cul, mon ventre sur son dos, ma main gauche sous sa gorge, son dos arqué par sa musculature troublante et l’onde qui l’envahissait. Cette nuit-là, elle avait remis sa culotte de coton gris. Son sexe, dessous, était nappé de ma bave mêlée à mon foutre. Un peu de neige est tombé à ses pieds. Et je lui ai demandé d’en prendre. D’en prendre dans sa main et de la glisser dans sa culotte. Elle m’a regardé avec ses yeux noirs. Son visage impassible. Habillée de son air insondable, elle a tiré quelques volutes d’herbe. Prenant son temps. Me laissant attendre et la regarder autant que je le désirais. Puis elle a plongé sa main dans la nuit, sur le rebord de la fenêtre, prélevant à l’épaisseur froide amoncelée sur la margelle de béton une poignée de neige et,sans me quitter du regard, dans ce silence nocturne, a déposé sa cueillette entre sa peau et le tissu gris. Ce tissu gris devenant plus sombre, instantanément plus sombre, jusqu’à ce que quelques humidités menacent de faire gouttes sur le parquet en chêne.
Je suis venu à elle, m’allongeant à ses pieds, disposant mon visage entre ses pieds. Enserrant ses chevilles de mes mains brûlantes, écartant plus encore l’espacement entre ses chevilles. Je voyais l’élastique imparfaitement couvrir les poils drus de son sexe, dévoilant presque une lèvre, l’élastique qui encore était d’un gris clair. Des perles d’eau s’y formaient. Alors j’ai ouvert la bouche. J’ai ouvert la bouche, écarté mes lèvres, attendant sagement, espérant que cela vienne, une goutte d’abord, sur le haut de ma lèvre, puis d’autres sur ma langue, au fond de ma bouche, gouttes de sa pluie hivernale, nuage de neige fondant sous le combustible de son ventre, pluie froide se changeant au gré de la tempête s’annonçant désormais averse tropicale. Mon sexe dressé, avant que le jour ne se lève et ne fasse fondre au dehors doucement l’hiver, il ne lui restait plus qu’à se ficher en moi, sur moi, sur cet étrange pieu. Il ne lui restait plus qu’à venir s’empaler sur cette chose qui me fait sexe, cette chose à laquelle mon esprit vorace et lubrique prête mille vies, sans autre avis de passage que l’étincelle qui subitement embrase les âmes, qui m’éloigne toujours plus de la sagesse, et qui toujours, pèlerin éternel m’invite à reprendre le bâton.
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