Accéder au contenu principal

Dans tes plis

 Dans tes plis, il y a l’ombre, il y a l’onde, il y a la saleté de fièvre, l’ondée sur la mer, la coulée de boue qui cavale, dévale sur les pentes raides de la montagne de granit. La montagne et les drues, la face nord basaltique, l’aiguille verte, et la falaise noire, le schiste qui s'effrite sous tes doigts pour mieux te précipiter dans le vide jusqu’à ce tu t’affales de tout ton être contre le carrelage froid, à nager dans ta bave, dans ta mouille, dans ta pisse ou la mienne, qu’importe tant il s’agit de nous, de nous dans la nuit, parce que seule dans tes plis tu ne l’es jamais. Dans tes plis, il y a tout un monde qui ne se voit pas, personne d’autre ne peut le voir que moi que celui ou celle qui finira par te prendre, te prendre à la gorge, la trachée bien haute et le regard déjà parti ailleurs, la bouffée d'air que tu te refuses pour partir plus loin encore parce que c'est moi, parce que ce sont les graines de foutre de mes mots qui t’engrossent le ventre à cet instant même, des traînées de soufre qui s’embrasent dans ta tête et qui te rendent pantelante pâmoison, champ apprêté pour la moisson, ou encore moissonneuse batteuse. Regarde comme c'est si simple de les faire fleurir et de te cueillir dans les blés mûrs, épis craquant sous la main, épis espérant l’incendie, le tumulte du feu, le brasier incarné. Je regarde ton monde et je vois tout autant le mien. Ce qui ne se dit pas. Ce qui n'a pas de mot. Pourtant c’est vrai, c'est bien là. Ton monde de petites choses, de minuscules détails qui se cachent dans les plis, les plis des paupières, la commissure de tes lèvres, le pli de la peau tendre en bordure de tes lobes, le pli de tes seins, de tes rides, de tes reins, de ton cul, de ton sexe, de la floppée de chair que je lèche lorsque je te prends de ma langue comme un chien avide et affamé, les plis sous le talon que je masse, que j’efface sous la crème. Tout ce que je décris là ne dit rien, ou pas assez encore du monde qui se fiche dans tes plis, c'est du papier froissé qui recèle des secrets vitreux, des secrets vicieux, des choses douces, sales et belles, des parasites qui dévorent le ventre lorsqu’il n’y a plus de digue, des petits êtres qui bouffent tout sur leur passage, toutes les résistances, toutes les frontières. Tout le monde finit par être englouti en toi, dans l’afflux de ton sang, dans tes larmes salées, dans tes bruits de gorge, de plaisir, l’ivresse du vent dans tes cimes, la force du typhon, l’arrachement des chairs et l’envol du souffle. Certains croient que ces bêtes se nichent dans l'orgasme qu’ils arrachent, dans la giclée de mouille salée qu’ils provoquent, certains croient qu’ils sont la naissance du monde, alors que ces bêtes voraces se cachent dans tous tes plis, tous tes pores, dans le fin fond de tes entrailles, sous tes côtes, dans l’air que tu expires, dans le réseau des synapses et des nerfs, quelque part derrière tus ojos, pas loin, dans les plis de ton âme qui te font basculer avec moi dans l’autre monde. Dans tes plis, il y a l’ombre, il y a l’onde, il y a la saleté de fièvre, l’ondée sur la mer, la coulée de boue qui cavale, dévale sur les pentes raides de la montagne de granit. Je crois que tout est dit, et pourtant rien ne l’est.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

PornographieS

 Texte écrit pour le thème du mois de juillet 2024 "Pornographie" du groupe fetlife "Passion Écrire" ---------------- # Porno \pɔʁ.no\ Adjectif. Relatif à, qui appartient à la pornographie ou à l'extrême violence. Caractère obscène d'une oeuvre d'art ou littéraire. Nom masculin. Film pornographique ou d'extrême violence. Représentation (sous forme d'écrits, de dessins, de peintures, de photos, de spectacles, etc.) de choses obscènes, sans préoccupation artistique et avec l'intention délibérée de provoquer l'excitation sexuelle du public auquel elles sont destinées Porno vice, porno star, sur le canapé les yeux ébahis. Je veux voir. Voir ce qui ne se voit pas. Toujours regarder, sans plus cesser. Des hommes, des femmes, des cris et des râles, simulés, amplifiés, réels, au-delà de l'écran, le néant, l'anéantissement de toute volonté. Le néant qui dévore sans fin, qui te mène en bordure de toi, qui t'empare et te désempare. Panti...

Je veux sucer

 J’aimerais sucer ma bite. Elle est douce, sa taille est sobre, elle est chaude et la caresser fait fleurir en moi toujours une sorte de quiétude, d’abandon serein et parfois d’excitation fiévreuse. Elle tient dans le creux de ma main. Le pourtour du gland est délicatement ourlé, il prend de l’ampleur après avoir joui. Elle m’apparaît démesurée dans le désir plein, lorsque je ne veux qu'une chose, jouir à n’en plus pouvoir. À la base du gland, le frein est formé d’un amas de chair, tendre et malléable, héritage de l’enfance et de la circoncision tardive, petit amas de chair aux sensations fulgurantes. Queue sensible à la moindre émotion. Je me saisis parfois du frein et le tire pour emporter toute ma chair. L'entrée du conduit urétral est une invitation à fourrer une langue. Lorsque la fièvre me prend c'est mon petit doigt que je viens parfois fracasser dans mon gland, l’aplatissant par le haut. Forcer le passage n’est pas une veine masturbation, dans ce délire là, quand il...

Deux peaux

 Deux corps exténués par la longue journée de marche. Ils ne se sont pas mélangés sur le chemin, se frôlant par instant, se touchant par accident aussi, s’éloignant, se retrouvant, tanguant au gré des pas, pris par la houle du mouvement. Deux corps, deux êtres singuliers, différents, se reconnaissant sans trop de mots et se trouvant par instant, se rapprochant pas après pas, le temps s’écoule en nuages, en pluie, en forêt d’eucalyptus, en chatagnier séculaire, en paroles confiées, en moments de vérité. La pluie tombe, sous l’abri, ils se plongent, prennent soin dans l’allongement du jour, l’un de l’autre. Del cielo cae agua. Lluvia poderosa. Lavame lamente con agua fria. Y saca la pena de mi memoria. Deux corps l’un contre l’autre après une journée sous les nuages au bonheur de trouver les choses belles, simplement belles, possibles, souhaitées, sans trop de mots. Dans l'alcôve, bercé par le fracas des vagues sur la plage, dans la chaleur réconfortante de la chambre, une peau contr...