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Un havre

 Je t'ai regardée. Nous parlions. Je te regarde toujours quand nous parlons. Je te vois trop rarement. Et c'est souvent un chavirement. Il n’y a plus de sexe. En tout cas, cela n'effleure plus de la même façon. Pourtant, je t’ai regardée, nos paroles se sont tues, et nos regards ont chaviré. Ou peut être ce n'était que le mien. Dans ces quelques secondes de silence j'aurais aimé t’étreindre. J’ai besoin de t’étreindre lorsque nous nous voyons. Je ressens le besoin de te serrer contre moi, de te toucher la main, de poser ma main sur ton épaule, de caresser ta joue. Mais lorsque je trouve le courage de le faire, j’ai peur d'être maladroit, j’ai peur que cela ne soit pas ce que tu souhaites. Alors ma main est fugace dans ce malaise qui me convainc que je ne suis pas à ma place. As tu remarqué cela ? J’aime ta façon de m’embrasser, ton bras m’enlace un peu, passe derrière mes épaules, je pose ma main sur le haut de ton bras, et je suis heureux de ce contact, quelques bises sur la joue. Tu le sais, j’aime te regarder marcher. Derrière toi. Tu as le pouvoir de rendre beaux ceux sur qui tu poses le regard. Nos regards encore qui se croisent, nos sourires. Les premières paroles, toujours enjouées, toujours heureuses de se retrouver et de se lier un peu le temps d’un pointillé. Cela forme un havre, quelque chose du domaine de la certitude, du calme, de la confiance, de la douceur aussi. J’aurais envie de te dire, je suis là pour toi. Je suis là. Et je crois que tu le sais. Tu le sais. Ce sont encore des mots que l’on ne dit pas. Je ne sais si c'est la même chose pour toi. Sans doute pas. Ou pas de la même façon. Parfois, j’ai peur de t’encombrer. Je n’attends plus ce que nous avons vécu il y a quelques années. Mais j’aimerais vivre encore du temps avec toi. Parce que tu es un havre, et que je le suis aussi. Parce que tu peux t’abriter sous moi, sous la chaleur de ma main, nager dans le flou de mes songes, te laisser flotter. Parce que tu me touches et je crois que je fais de même avec toi. Est-ce que je t’espère, ou est-ce que je t'attends ? Il me faut du temps pour ne plus t’espérer, autant pour ne plus t'attendre, et ce temps toujours recommence dans le mouvement qui me ramène à toi. Toujours. Je ne t'espère plus, mais je suis là. Oui, je crois que je t'attends. J'attends sans attente. J’ai appris cela avec tes silences. Lorsque nous nous séparons, c’est là que je ressens le plus fortement ce besoin de t’étreindre. Ma vieille timidité joue les garde-fous, elle s’est muée avec le temps en délicatesse, en retenue, en silence qui ne sont pas pesants. Je me sens parfois très ému, alors je plonge vite dans ce que j’ai à faire. Juste, je suis là. Pourtant, j’aimerais. J'aimerais parvenir à te dire ce que j'écris là. Quel regard poses-tu sur moi ? Quel regard poses-tu lorsque je me fonds en silence dans tes yeux, le visage esquissé d’un sourire troublé, entre la mélancolie, la douceur et la chaleur ? Il m’a semblé puiser dans ton regard et dans ce même silence un peu de cela. Était-cela ? Il n’y a pas si longtemps, j’ai eu envie de te proposer de me rejoindre à Paris. Ou ailleurs. Maintenant que je suis davantage libre de cela, c'est toi qui ne l’est plus. J’ai caressé cette idée, pas pour vivre ce que nous y avons déjà vécu. Non. Juste pour vivre un peu avec toi. Juste toi, moi, nos sensibilités et nos douceurs, nos larmes peut-être aussi, nus au sens de nos âmes mises à nues, nos âmes vêtues de la douceur confiante qui nous lient. Je me suis fondu dans ton regard, dans nos silences, et je me suis tu, pour ne pas t'alourdir davantage, pour ne pas que tu puisses te sentir en déphasage entre ton ressenti et le mien. Parce que peut-être tu aurais pu croire qu’il y avait là une attente de ma part, je ne veux pas être un poids, un nuage. Tu as déjà trop de choses qui pèsent sur tes épaules. Je te dis juste que je suis là pour toi, et parfois tu me manques, et parfois je sais que si nous nous retrouvions une nuit, nous saurions vivre et être ensemble dans la nuit douce.

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