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Geisha organique

Je me suis inspiré d'une très belle musique éponyme de mon amie Chamylia, si vous souhaitez lire ces mots accompagnés de la musique pour laquelle ils ont été créés, il vous suffit de me le demander.




Motiro. Me yeno tedeba. Akaku. Oni. Umi yomo ta. Akina nii.

Limpide
Je l'entends pour la première fois
Petite voix intérieure
Douce voix étrangère
Je l'entends
Ne la comprends pas
Je la ressens
Elle est là
Paupières closes
Respiration calme
Lente
Je la laisse faire
Doucement
Ses mots me touchent
Un à un
Elle m'imprègne
Timbre fluide
Calque de mes pensées
Syllabes intimes
Caressantes
Inconnues
Alphabet asiatique
Geïsha organique
Invisible
Compte goutte
Perfusion synthétique
Rythme intraveineuse
Battement de plume
Sous ma peau
Dans mes veines
Transhumance en tout lieu
Mon corps s'efface
Abstraction mélodique


Motiro. Me yeno tedeba. Akaku. Oni. Umi yomo ta. Akina nii.


La voix se fait plus présente encore. Alors que le réveil se fait, je sens mon corps et mon âme partir loin, partir ailleurs sur les traces de cette voix étrangère et troublante. Des lianes me caressent de toute part, le sol se teinte d’un vert lumineux, les murs en sont pénétrés. Mon lit devient mousse, herbe, floraison printanière, des impressions végétales parcourent mes veines. Je me fonds dans cette nouvelle virginité, guidé par ces mots asiatiques. De ma chambre cloisonnée me voilà libre au coeur de vastes plaines nuageuses. La sonorité de cette nature neuve et immaculée se distille jusque dans mon souffle. Une bruine chaude, un crachin tiède, une brise légère rend progressivement mon corps liquide. Je deviens l’eau, liquide comme cette voix énigme. Je m'évapore aussitôt. Je suis alors éole, volant par dessus les étendues  verdoyantes, pris dans une course où le temps se fige, je veux que mon souffle parcoure la peau et le timbre de cette voix ensorcelante qui accompagne chacune de mes pensées. Guidé à une forêt de bambou. Impénétrable, secrète. J'y pénètre. Ma présence fait ondoyer les feuilles acérées des grandes tiges verticales. Vert translucide. Des ombres, nombreuses, parsemées, cercles sombres au sol, face à la forêt verticale. Je me fonds en elle. Je me multiplie. Au Nord, à l’Ouest, au Sud, à l’Est, je pars à sa recherche en quête de son écho musical et hypnotique. Orienté par la musique, je vis l’initiation geïshatique. Un rite floral. Enfin. Entre le vert et l’ombre je découvre une peau blanche, le velours délicat d’une fleur de nacre. Je crains qu’elle ne s’efface une fois parcourue de mon souffle. Doucement. Lentement. Orchidée féminine au parfum exotique. Prolongement des bambous, elle m’offre le contraste d'un corps liane et de la rigidité des grandes tiges. Elle. Moi. Je tends ma main, effleure la surface de ses chairs. Et c’est elle qui me pénètre, elle foisonne en moi. Elle bat en mon cœur et fait affluer mon sang vers la surface caressée. Virginité florale, shibari extatique. Je vis une offrande parfaite, l’offrande d’une princesse au service du roi que je suis.


Koriu ki. Kolo ni va. Aï. Yutiro. Maeyo tekita. Soleba.


Je m’approche. Elle m’envahit paisiblement. Je n'ai pas peur. Elle est en moi, je sens son odeur de femme, de partout. Prégnante, elle imprime chaque forme de vie de son odeur féminine. Complexe, légère et sombre. Je suis conquis, prisonnier de sa voix et de son corps. Elle prend racine dans le sol, terreau fertile qui propage à l’infini sa beauté végétale, tissant des liens invisibles et souterrains. Chaque feuille, chaque fleur, devient autant de caresses qu’elle sait me prodiguer. Me voilà nu, complètement démuni, tout à fait conquis, perdu dans les bras frais et subtils de cette femme nature. Je deviens minéral. Je profite de son énergie pour en garder la chaleur, la restituer, la faire bouillir et croitre, croitre sans limite, gonfler, me gorger de sa voix et devenir dur, viril, pierre. Sans fin. Son offrande me rend fort, je me nourris de sa fluidité pour concentrer en moi les pierres les plus précieuses. Le cœur rubis, bouillant, rouge presque noir. Mes yeux de jade, du bleu au vert, léger, éthéré, absent. Son regard noir, pépites noires parfaites où les rois se noient. Mes mains blanches, sur sa peau de diamant, je deviens diamantaire. Orfèvre. Ses lèvres au rouge subtil et enivrant, lie de vin aux saveurs minérales. Et je croîs encore, une croissance où fourmille la lave chaude, prémices des énergies destructrices et régénérantes. Mon esprit devient feu. Je brule de la fraicheur végétale qu’elle fait couler en moi. Je crains de la pervertir, de la souiller par la chaleur moite qui s’exhibe de mon être. Son écho est en moi, et encore elle m’apaise, elle me conforte, me rassure, je ne comprends toujours pas ses mots, mais je comprends leur sens. Viens. Ne crains rien. Viens. Suis-moi. Soit en moi. Soit pour moi. Donne-moi la vie. Fais couler ta lave en moi. Viens.


Koriu ki. Kolo ni va. Aï. Yutiro. Maeyo tekita. Soleba.


Déclic. Ni contrainte, ni tabou. Déclic. Je deviens enragé. Je la prends. Je la serre. Je l’étreins. Autour de moi tout s’estompe, tout se confond. Il n’y a plus d’espace, plus de plaine, plus de feuilles, plus de son, juste sa voix, toujours. Juste le désir irrépressible de prendre cette offrande, elle est faite pour moi et je la dévore des yeux, des mains, des lèvres. Une jambe à l’entrejambe. L’eau coule, source décuplée. Je la mords, je veux te manger, te baiser, me nourrir de toi, t’absorber. J’enserre ses reins, la soulève, la libère. La liane s’enroule autour de moi, me lacère, me caresse. Déchainé, je serre, encore, je veux qu’elle rentre dans mon torse, l’avaler entière, l’absorber toute entière. Animal, je suis en rut, je ne pense plus, je ressens, je vis. Je la déchire de toute ma longueur miraculeuse, arqué comme jamais, je la pourfends et sa voix est toujours douce, rassurante. Elle me parle, toujours les mêmes mots. Elle m’invite, plus loin. Elle m’invite à me noyer de son eau végétale. Elle me souffle de la faire femme, passer la virginité florale, lui offrir la vie et la force. Je n’ai pas à forcer, les chairs s’écartent, fondent, se répandent en mon corps, fraicheur et chaleur. Toujours si blanche, si pure. Et moi rouge, fulminant, aussi sombre qu’un taureau massif. Le combat est inégal, mais je ne sais pour qui. Elle m’épouse parfaitement, se moule sur mes propres formes masculines. Je rentre, plus loin, encore plus loin, profondément, et je m’ancre au fin fond de ses chairs chaudes et accueillantes. En un instant tout se confond, tout s’écoule, fusion, brulure, frisson, brulant, dévastateur, et ses mots, litanie douce et troublante... recommencement...


Motiro. Me yeno tedeba. Akaku. Oni. Umi yomo ta. Akina nii.



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