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L'allumette

 Ce qui arrive c'est la chaleur qui se propage d'abord, la vague qui monte inexorablement, le désir qui se fait haut, les pensées prises d'assaut, le lac des fantasmes qui déborde, l'orage qui devient monstrueux, les éclairs qui finissent par strier les profondeurs du ventre, les peaux qui se pénètrent, les regards qui se voilent, les souffles qui s'affolent, je veux qu'ils me foutrent jusqu'à en perdre connaissance, jusqu'à ce que je ne sois plus que chair malmenée, jusqu'à ce qu'ils m'arrachent des cris entre la douleur et la jouissance, je veux cela si ardemment et que cela n'en finisse plus. Des cris résonnent dans ma tête, font vibrer les côtes qui bordent mes poumons, obscurcissent mes veines à m'en bouillir les sangs. Dans ma bouche des sexes se succèdent, des sexes, des sexes. Je voulais cela, j'ai cela. Ça cavale dans mon sexe. Cela me remonte l'échine, me retourne le ventre. Je l'ai voulu comme cela. À moins que ce soit lui. Lui qui m'a attachée et qui m'a livrée en pâture. Lui qui m'a écartelé les mâchoires, regardant ma bave glisser sur mon menton, s'étaler salement sur mes seins, pourrir mon pubis poisseux, tandis qu'un sexe m'écarte l'anus, qu'un autre me baise la bouche sans la moindre attention à mon confort. Plus fort sera l'amoncellement, plus loin ma disparition, décuplement des sensations, vibrations de l'instant. Et moi qui les ai regardés tous dans le blanc des yeux, défiés de me couvrir de leurs vices. Le regard noir. Le regard méchant. C'est tout le temps. C'est tout le temps que je veux ça. Que ce soit dur. Que ce soit méchant. Putains de connards qui ne pensent qu'à fourrer le corps que je suis, à prendre leur part de gibier, ils veulent me dépecer, croient me saisir, me dominer, être les seuls, les uniques, les mâles. Et moi, je le veux. Je veux qu'ils croient. Je veux qu'ils se croient petits roitelets. Ils sont ma rampe de lancement, ils ne peuvent rien pour moi. Toi, tu peux. Tout le temps. Tu peux tout le temps. Dis-le. Dis-le. Dis les mots qui vont m'arracher à la surface pour m'enfouir vivante dans les tréfonds. Crache. Crache-les à ma face brinquebalante, tourmentée de leurs coups de boutoirs. Défonce-moi le crâne à force de saloperies glissées dans mon cerveau. Je me donne pas deux minutes dans la cohute des sexes, le temps de laisser tes idées puantes vaincre les dernières digues. Je t'entends tempête. Je t'entends les dire. Je t'entends m'ouvrir le ventre. Je t'entends me dire. Je t'entends plonger tes mains sous ma peau. Je t'entends lécher les sinapses de ma tête pleine de foutre. Oui, je t'entends. Ohhhhhh oui. Je l'entends. Ce battement, ce vrombissement, cette brisure de mes berges, ce fracassement de mes membres. Ce truc qui me fait partir à tir d'aile. Ce truc qui va me faire pleurer, chialer comme une pisseuse tellement je suis assaillie par tes mots, tes gestes, ta salive qui me brûle, ta monstruosité qui se répand et le désir qui brûle, l'allumette cramée, soufflée, brisée, jetée sur la paille sèche. Mon corps qui convulse, les cris fauves, je donne des coups, je mords, je crache. J'ordonne qu'on m'abandonne. Je veux que l'on cesse de me toucher, de me regarder. Après la flambée, j'ai besoin d'être seul. Tu fais partir les queues. Tu me laisses à mes convulsions. 


Toi, tu sais.

Tu sais.


Le calme.


Le calme.


Avant qu'un nouvel incendie vienne à se déclarer. L'allumette jetée.



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Bande son : Olivier Depardon, EP Blanc, EP Noir

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