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Un soir après 25 années de vie commune

 L'épouse : Je ne suis pas belle.

Le mari : Tu es belle.

Elle : Non, je ne suis pas belle.

Lui : TU ES BELLE.

Elle : Je ne suis pas belle.

Lui : Pourquoi dis-tu cela ?

Elle : Parce qu'à bientôt 48 ans personne ne m'a jamais draguée.

Lui : Aurais-tu oublié ton amant éphémère ? Le client d'il y a quelques mois ? Cet autre jeune-homme, il y a quelques années.

Elle : Je ne suis pas belle

Lui : Pourquoi tu n'es pas belle ?

Elle : Parce que personne ne me drague.

Lui : Pourquoi personne ne te drague ?

Elle : Parce que je ne suis pas belle.

Lui : Ok, admettons que ce soit une hypothèse pour une partie des gens. Mais,.pour l'autre partie des gens qui te trouvent belle, pourquoi, comme tu sembles le penser, est-ce qu'il ne cherchent pas à te séduire ?

Elle : Parce que je ne suis pas belle.

Lui : Fais un effort.

Elle : Je ne vois pas

Lui : Est-ce qu'une hypothèse pourrait être liée au fait que tu ne les vois pas ces gens ? Que tu leur semble inaccessible ? Et que même s'ils te donnent des signes de leur intérêt pour toi, il ne t'es pas possible de les voir ? Voire, même, tu les rejettes, tu les refuses inconsciemment ?

Elle : Non, je ne suis pas belle.

Lui : Moi, je ne suis pas particulièrement beau, et je ne me trouve pas particulièrement beau, même si en ce moment, je trouve que je le suis un peu. Je ne me fais pas draguer, mais je vois des regards, des sourires, des petites phrases qui peuvent m'être destinés. Je ne m'en saisis pas, mais je les vois. Certaines personnes me trouvent donc beau.

Regarde, dit-il s'apprêtant à faire une démonstration positive de son regard à elle sur lui, est-ce que tu trouves que je suis beau ?

Elle : Non.

Lui : ... Non, tu ne trouves pas que je suis beau ? Tu ne m'as jamais trouvé beau ?

Elle : Non.

Lui : ah... Tu ne trouves pas que je suis beau ?

Elle : Non.

Lui : Mais du coup, je pense qu'il faut que nous interrogions ce que c'est être beau.

Elle : Être beau c'est quand tout le monde se retourne sur ton passage.

Lui : ah ouai... En effet, vu comme ça... C'est sur.



Plus tard, au milieu de la nuit, et puis au réveil, et puis dans les transports en commun, et puis à la pause déjeuner. Voix off, dialogue intérieur à deux voix.


Voix de lui-A : Putain, ça fait 25 ans qu'on est ensemble et elle ne me trouve pas beau, c'est pour ça qu'elle me dit si rarement que je suis beau !!

Voix de lui-B : Mais non, elle ne dit pas qu'elle ne te trouve pas beau, elle dit que tu n'es pas un putain de canon.

Voix de lui-A : Ouai, elle a dit que j'étais pas beau quand même.

Voix de lui-B : Mais toi, tu te trouves beau ?

Voix de lui-A : Non, plutôt non. Même si des fois, oui, par moment.

Voix de lui-B : Tu vois, c'est pas contre toi.

Voix de lui-A : En tout cas, elle n'y est pas allée par quatre chemin. Mais le pire, je crois, c'est pas que je ne sois pas beau, c'est qu'elle ne me trouve pas beau.

Voix de lui-B : Elle a pas dit ça.

Voix de lui-A : Non, mais je crois que c'est ce qu'elle pense.

Voix de lui-B : ...

Voix de lui-A : ...

Voix de lui-B : Bon... On fait quoi maintenant ?

Voix de lui-A : On se barricade et on laisse venir

Voix de lui-B : Et si on laissait juste venir, que ça aille mieux pour elle ?

Voix de lui-A : C'est que ça peut prendre des années, voire toute la vie...

Voix de lui-B : On laisse venir et toi, tu te concentres sur tout le beau qu'est en toi, autour de toi, et aussi en elle.

Voix de lui-A : Tu crois que ça peut marcher ?

Voix de lui-B : Tu dis quoi toi d'habitude.

Voix de lui-A : Je dis que c'est moi le responsable et je prends tout sur moi.

Voix de lui-B : Et moi je dis quoi ?

Voix de lui-A : Toi, tu dis qu'il nous faut prendre que ce qui nous appartient, et pas ce qui appartient aux autres.

Voix de lui-B : Est ce que cela nous appartient qu'elle ne nous trouve pas beau ?

Voix de lui-A : Non, on n'y peut rien. Le moment est comme ça, elle est tout en bas, elle peut rien voir de beau, rien du tout.

Voix de lui-B : Alors ? On se barricade ?

Voix de lui-A : Non. Mais on attend, on la laisse revenir.

Voix de lui-B : C'est mieux.

Voix de lui-A : N'empêche, elle ne nous mérite pas.

Voix de lui-B : Pas en ce moment. Mais en ce moment, elle a quand même besoin de nous.

Voix de lui-A : Ouai...

Voix de lui-B : Alors ?

Voix de lui-A : Alors, on prend notre part, pas plus, on est présent, on se cultive aussi ailleurs. Et si un jour ce n'est plus tenable, on arrêtera. Je le déciderai. Et cette fois, sans culpabilité.

Voix de lui-B : N'oublie pas, elle rejette tout, et toi avec. C'est comme ça qu'elle arrivera à sa façon, peut-être, à reconstruire des fondations plus stables. Et toi, forcément, tu fais partie des fondations.

Voix de lui-A : Mécanisme d'auto-défense. Dépression. Tout est sans filtre. Ça, ça lui appartient.

Moi, je m'aime. Ça, ça m'appartient.

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