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Johnny belle gueule

La nuit ici, on peut pas dire que ce soit calme. Il y a toujours du bruit. Des engueulades. Des cris. Des hurlements. Des portes qui claquent. Des gonds qui grincent. Le bruit des pas sur le sol. Des gens qui parlent, qui hurlent ou qui chuchotent, qui s’invectivent ou s’insultent. Au début, de toute façon on ne dort pas. Alors qu’importe le bruit. Le silence pourrait être de cathédrale, cela ne changerait strictement rien. C’est impossible de dormir au début. Tout défile. Tout. On se repasse le film. Est ce que j’aurais pu faire autrement ? Et toujours la même conclusion. “J’y suis”. Et ce j’y suis ne laisse pas beaucoup de place. D’abord parce qu’il n’y a de place ici pour personne. Ensuite parce que le corps est retors, il ne s’efface pas. Où que l’esprit aille, ici le corps est là. Avec ses limites. Des limites physiques. Le couloir. Le réfectoire. La cour. L’autre cour. Les barreaux et le corps qui ne parviendra jamais à s’évader. Et toujours le regard des autres. Constamment. Celui de ceux avec qui tu traînes. Celui de ceux qui te surveillent. Celui de ceux qui te menacent. Celui de ceux qui te convoitent. Celui de ceux qui te visitent. Celui de ceux qui pioncent avec toi, qui vivent avec toi, qui te regardent chier, qui te regardent te laver, te branler, te curer le nez, celui de ceux qui finiront par te baiser, ou alors que tu baiseras enfin. Parfois je me demande quelle est l’odeur de chacun tant nous puons tous la même odeur. On bouffe pareil. On respire pareil. On sue pareil. On travaille pareil. On chie pareil. On se branle tous pareil. Dans nos lits, face au mur, cachant en vain ce que tous savent.


Finalement, un jour, le sommeil finit par venir. Même les mains qui nous tripotent, qui glissent entre nos jambes, même celles-là ne nous réveillent plus. Nos corps sont morts. Et même si nos bites sont encore raides, elles sont vides. Il ne nous reste plus qu’un refuge. L’espace qui, je l’espère, ne m’échappera jamais. Je parle de ce qui se passe dans nos têtes. Là, je peux rêver sans limite, imaginer les évasions les plus savantes, les plus mystérieuses, les plus dangereuses. Je ne sais pas si c’est la porte de sortie de chacun des mecs qui crèchent ici forcés et contraints. Le bon grain a été séparé de l’ivraie. Nous sommes l’ivraie. On ne donne que de mauvaises choses, et ce n’est pas ici que l’on deviendra meilleur. L’imaginaire est mon odyssée. J’ai du mal à imaginer que ce ne puisse pas être le cas pour les autres. En tout cas, c’est assurément la mienne. Plus les mois passent et plus j’ai la sensation que mes fantasmes grandissent démesurément. A coup sûr je finirai pas revenir ici, mais cette fois ce ne sera pas pour un vol ou une escroquerie bien pesée, non. Je reviendrai pour attentat à la pudeur, exhibitionnisme, trafics et consommation de drogues pour la baise, commerce démesuré de mon corps, proposition indécente à un jeune juge en bois brut ou à une vieille décrépite comme dirait l’autre. A force de repousser les limites de mes fantasmagories je me demande parfois si je ne finirai pas par oublier la réalité.


Là, il est 21h30. Couvre feu d’ici 30 minutes. Dans 30 minutes, il passera. Dans 30 minutes, le joli petit cul dans son uniforme bien moulant passera devant notre porte. L’ouvrira. Inspectera que nous sommes tous dans nos plumards, calmes. Et moi, je le reluquerai. Son petit sourire de putain que j’aimerais bien lui faire ravaler. Non pas en lui faisant mal, non, en lui faisant le plus grand bien. Parfois je me demande si tout cela n’est pas dans ma tête. Je crois que ça commence à faire un bout de temps que je le mate. Mais parfois, je ne sais plus, je peux même avoir du mal à être certain que cela existe. J’imagine parfois qu’il rentre dans ma cellule, que je suis seul. Il vient me border. Il remonte ma couverture sur mon corps nu, glisse sa main sous la couverture et se met à me caresser doucement, le plus lentement possible, tout en posant son autre main sur mon cou, ou dans mes cheveux. J’ai parfois les cheveux longs et sa main s’emmêlent dans ma tignasse pour assurer sa prise avec un poigne irrésistible. Cela tire, et je ressens parfois la douleur imprimée à mon cuir chevelu. J’en gémis, tandis qu’il continue sa besogne. Me branlant de haut en bas avec une extrême délicatesse. Dans un silence le plus total. Il y a plusieurs mois, tandis que j’étais assis seul sur un banc, il s’est positionné derrière moi. Debout. Je sentais son parfum bon marché. Je l’entendais mâcher bruyamment son chewing gum comme à son habitude. Il a fini par le balancer dans la poubelle à côté. J’ai eu envie d’aller le chercher parmi les détritus pour le mettre dans ma bouche et l’étirer sur ma langue longtemps avant de le mâcher. Cet homme me reluque salement. Il joue devant moi de sa matraque. Les yeux dans les yeux. Il parle rarement, ou alors c’est pour nous humilier, mais j’ai bien compris qu’il me montrait sa queue en jouant devant moi de son compagnon de travail. J’ai couché chacune de ces dates dans mon journal intime. Le problème c’est que mon journal intime est aussi grand que ma boîte crânienne, alors pour ne pas oublier je ressasse chaque nuit chacune des pages que j’ai pu y écrire. Inévitablement les dates et les faits s’emmêlent un peu. Mais c’est parfait pour s’endormir. S’endormir en se branlant, en se paluchant, se pognant, s’astiquant, se masturbant. Combien de mots, de verbes, d'expressions pour dire la baise à bas prix qu’il nous reste ici, exception faite des viols collectifs et des attouchements consentants, on n’a pas grand chose d’autre. C’est toujours douloureux pour moi, parce que inévitablement après avoir bien décollé, il y a tous ces bruits de beuglement, de violence, d’irrespect et de détresse qui reviennent inévitablement comme une marée haute restée longtemps trop haute. Je me baise. Je me cheminée. Je fais volcan. Je crache mon foutre sur sa belle gueule d’ange vulgaire, mon petit maton à moi.


Avant hier, quand il est venu me coucher, il a glissé quelques mots dans mon oreille. “Tu crois que je vois pas ton petit cinoch, espèce de pédale. Je vais te baiser moi, histoire de t’apprendre à bien me reluquer”. Evidemment, je me suis foutré de plus belle. J’ai senti sa langue lécher mon oreille tandis que je lui tournais le dos. Hier, après la balade matinale, j’avais un mot dans mon pieux. Je ne connais pas son écriture. Ce n’est pas signé. Mais je suis sûr que c’est la sienne. “A compter de la semaine prochaine. Tous les matins à 7h00, c’est moi qui déverrouillerai la porte. Tu sortiras avec les autres directions le réfectoire. Pendant ce temps, j’inspecterai la cellule. Je passerai ma main dans tes draps. Et j’ai intérêt à en ressortir la main pleine de ton foutre.


Cette nuit a été courte. Il est 6h30, cela fait déjà 2h que je me secoue le manche. Putain, je bande fort, comme un ahurri de première. J’entends des pas qui passent dans le couloir. Je sais que c’est lui. Il s’arrête derrière la porte. Il ne bouge plus. Je me branle de plus belle. J’imagine sa respiration, c’est comme si je l’entendais au travers de la lourde porte. De l’autre côté du mur, il peut me voir. La caméra. L’écran. Je n’hésite pas un instant. Je baisse la couverture. Ma queue est chaude. Ma queue est fraîche. Elle prend le large. En face, il y a Yaz qui ne dort pas. Il me regarde. Il ne me quitte pas des yeux. Et lui aussi, je vois bien qu’il a sa main sous son drap et que ça bouge là bas dans l’ombre. Je suis leur putain en cet instant. Je me rêve rockstar avec une guitare électrique à six cordes déclenchant le foutre de milliers d’homme et la mouille de milliers de femmes à chaque fois que mes doigts ébranlent les cordes. J’aimerais qu’ils jouissent. Yaz et le connard de service qui me rend triquard. Johnny belle gueule et son regard vicieux. Même les autres mecs de la piaules. Tous ! J’aimerais qu’il giclent. Les pas repartent, s’éloignent. Est-ce que je lui ai filé une telle envie qu’il va aller s’emmancher dans les toilettes réservées aux matons avant de revenir pour bander à nouveau de plus belle. J’aimerais qu’il me montre sa queue. Est-ce que j’oserais le sucer. Je ne sais pas si je sais bien faire. Toutes les queues que j’ai sucées, c’était haut le cœur sur haut le cœur. Mais c’était des bourrins. Lui, je pourrais le sucer comme j’aimerais qu’on me suce. Avec la plus extrême lenteur. Je crois que je plongerai mon nez dans les plis de l’aine et je lècherai, et j’aspirerai. Avec douceur. Avec fougue aussi. Je lui ferai cracher tout son foutre à lui offrir tant de bienheureuses promesses. Je regarderai son sperme jaillir sur son ventre musclé. Je regarderai son foutre s’épancher, tomber à la verticale de son gland pour se mêler aux poils de son bas ventre, et je ne cesserai pas de m’appliquer, je ne lâcherai rien de mon emprise parce que je veux lui vider les couilles au gardien de mes songes. Qu’il n’aie plus rien, plus aucun foutre à expulser pour ses prochaines jouissances. Ensuite, c’est simple, mon cul sera à lui et il pourra y jouer tant qu’il lui plaira.


Je m’excite de toutes ces pensées. J’ai l’impression qu’il n’y a pas que Yaz qui se branle dans la pièce. Ils sont tous en train de se branler comme des crevards et moi avec. Dehors, je crois entendre des mains se posant sur la porte, matant au judas. D’autres pas, plusieurs hommes sont derrière la porte. Ils doivent mater à l’écran ceux-là. J’aimerais qu’ils ouvrent la porte et qu’ils viennent partouzer avec nous. Mon sexe est tendu à l’extrême, ma main serre mon gland. Mais cela ne me suffit pas. Mon petit doigt vient se ficher dans l’oeil de mon sexe, je pousse, je veux qu’il s’écarte, je veux voir mon doigt disparaitre en moi, je me branle comme cela, soufflant de murmures fiévreux, souffrant de rales délirants. Je sens que la puissance de mon orgasme approche en un raz de marée fatal. J’ai à peine le temps de remonter le drap pour jouir dedans et râlant comme un animal. Je jute à n’en plus pouvoir. J’en ai plein les mains. Des mains fines que j’essuie dans le drap, n’essuyant rien sur ma peau et foutant encore davantage de sperme sur mes doits, plus encore qu’il n’y en avait au début. Mon bassin poursuit sa petite danse, des petits coups de rien qui disent que je suis chien, chien qui baise jusqu’à plus soif. Dehors cela a dû juter sacrément. Ici, les cinq autres gars ont du juter pareil. J’entends les bruits des portes et des gonds. Les mecs qui commencent à gueuler, à se plaindre, à se battre. Dans ma cellule, pourtant, il n’y a pas un bruit. Notre porte s’ouvre. Johnny belle gueule est là. L’uniforme bien moulant sur une jolie petite queue bien dure. 

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